L'ascenseur
Publié le 5 Février 2018
Comme chaque matin, j’arrive devant la porte de l’immeuble de mon entreprise, Mon bureau est au 3ème étage. Je pourrai emprunter l’escalier pour suivre les conseils de mon médecin qui me trouve trop sédentaire et soutient mordicus qu’il faut que je fasse de l’exercice. Si tu penses que je vais te croire mon cher Docteur. Je me dirige vers l’ascenseur au fond du couloir.
Il est là à m’attendre la porte grande ouverte. J’appuie machinalement sur le chiffre 3. Les portes se referment. Je suis seule dans la cabine. N’aimant pas trop les espaces clos, une légère angoisse monte en moi. Je crains que l’ascenseur s’arrête entre deux étages et l’idée de rester coincée dans cette boîte de fer est insupportable. Je regarde les chiffres défiler : 1, 2, 3. Je me rapproche des portes coulissantes pensant qu’elles vont s’ouvrir. Elles ne s’ouvrent pas et je sens que l’ascenseur continue à monter…. Je lève les yeux sur le panneau lumineux indiquant les étages, les chiffres continuent à défiler très vite 4, 5, 6 . Je me dis que peut être quelqu’un a appelé l’ascenseur, ce n’est pas grave, je redescendrai au 3ème avec lui.
L’ascenseur a pris de la vitesse. Il va de plus en plus vite, trop vite : 7, 8, 9, 10. Angoisse totale l’immeuble n’a que 10 étages…. L’ascension vertigineuse continue …La cabine est devenue transparente, je suis maintenant dans le ciel de Paris que je vois tout petit à mes pieds…. Curieusement j’angoisse moins, je me sens libérée de la cage de fer, mais il faut stopper cette ascension, je ne crois pas en Dieu.
Dans un bref éclair de clairvoyance, je me dirige vers le clavier et j’appuie sur le RC espérant que l’ascenseur se mette à descendre…. C’est ce qui se produit. soudain la cabine s’obscurcit à nouveau et les chiffres réapparaissent sur le cadran : 8, 7, 6, 5. J’émets l’espoir soudain qu’il s’arrêtera bien au 3ème mais il continue sa chute inexorable : 2, 1, RC, - 1, - 2..…. Vite appuyer sur une touche, je ne veux absolument pas m’enfoncer dans les entrailles de la terre s’il dépassait le 3ème sous-sol.
Je suppose soudain que la touche 3 ne fonctionne pas. J’appuie sur le 4 et s’il voulait bien s’arrêter et ouvrir ses portes au 4ème je redescendrai à pieds par l’escalier L’ascenseur stoppe aussitôt sa descente et se remet à monter doucement d’abord puis très vite il dépasse le 4ème, de nouveau le ciel et Paris à mes pieds. Non ne pas monter plus haut, allez du cran Martine si tu veux te sauver de cette cage infernale ! J’appuie sur RC de nouveau.
L’ascenseur stoppe aussitôt son ascension vertigineuse et se met à redescendre à très grande vitesse, c’est certain je vais m’écraser au sol. Je transpire à grosses gouttes, ma vie défile très vite dans ma tête.
Soudain freinage violent de la cabine qui atteint le RC et s’arrête. Soulagement les portes vont s’ouvrir et je vais pouvoir sortir de ma prison. Les portes ne s’ouvrent pas. Je sonne pour appeler les services de maintenance. Pourquoi n’y ai-je pas pensé avant ? J’appuie sur la petite cloche et au même moment l’ascenseur repart mais il ne monte plus, il ne descend plus non plus.
C’est étrange il se déplace au niveau du sol, il est parti sur la gauche et emprunte le trottoir de la rue de Clichy. Les portes sont devenues transparentes, la circulation est intense à cette heure, je vois les voitures défiler, les bus, les «Vélibs», la brasserie du casino de Paris où je déjeune le midi. Aucun passant ne semble voir cette cabine motorisée….
La sonnerie du téléphone retentit soudain dans ma boîte, ce doit être le service de maintenance. Je décroche le téléphone mais il continue curieusement à sonner….
Je me retrouve soudain dans mon lit. Le réveil sonne insistant et je prends conscience que j’ai encore fait ce stupide rêve de l’ascenseur que je fais très souvent mais nouveauté aujourd’hui, la cage infernale s’est déplacée horizontalement dans mon rêve…. A deux ans de la retraite, aurais- je enfin trouvé avec l’âge la sagesse en comprenant qu’à force d’avoir voulu monter trop haut dans l’entreprise, j’étais en train de chuter sans corde pour me retenir ni filet pour amortir la chute.
Martine / Pour le défi 53 de Ghislaine .
Les mots en gras et la phrase en rouge sont imposés par Ghislaine