Bribes d'adolescence (2) - Les années CET
Publié le 17 Avril 2010
Après :
- Bribes d'enfance (1) Les années bonheur (1953 / 1959)
- Bribes d'enfance (2) - La fille de papa
- Bribes d'enfance (3) - les années difficiles
- Bribes d'enfance (4) - Amitiés
- Bribes d'enfance (5) - Fin d'enfance
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Bribes d'adolescence (1) - Marie-Pierre
Voici la suite de ma biographie :
Mes parents n’ayant pas les moyens de me payer des études secondaires dans un lycée privé, il me fallait continuer mes études de nouveau dans le public. Je dus donc passer un concours d’entrée en 6ème concours exclusivement réservé aux élèves du privé souhaitant passer dans le public. Bien qu’étant bonne élève et ayant obtenu facilement mon BEPC, je fus recalée.
Mon rêve étant de devenir journaliste pour valoriser ma passion pour l’écriture mais je savais que mes parents ne pouvaient pas me payer ses études.
Alors je voulais devenir sage-femme. Pour moi aider à donner la vie était le plus beau métier du monde. Mes parents s’y opposèrent. Il ne faut pas oublier qu’ils avaient perdu leur fils mort né à cause d’une erreur d’accouchement. Il leur en était resté une rancœur importante contre le corps médical et alors qu’ils n’étaient jamais d’accord en ce qui me concerne, cette fois ci, ils firent front contre moi. Ils prétextèrent que ce n’était pas un métier pour une femme à cause des horaires qui empêchaient d’être disponible pour les siens. Je leur en ai beaucoup voulu.
Je décidais donc de faire les études les plus courtes possibles et je décidais de rentrer dans un collège d'enseignement technique (CET) à Asnières pour préparer un BEP de secrétariat. Je pourrais ainsi en deux ans avoir un métier, trouver du travail et enfin prendre ma liberté et les quitter enfin.
C’est ainsi qu’un beau jour de septembre, je fis ma rentrée dans ce collège public d’enseignement technique tout
près de la Gare d’Asnières. Venant du privé et sachant comment on considérait dans le public les élèves venant du privé, j’étais au début très méfiante et sur mes gardes. Je redoutais le
pire.
Je fus surprise de constater que tous les profs semblaient ignorer cela et je fus très bien accueillie.
La plupart de mes collègues avaient de sérieuses difficultés scolaires ce qui n’était pas mon cas.
J’appris la dactylographie sur de vieilles machines underwood. Il fallait apprendre à taper sans regarder ses doigts avec un cache clavier pour résister à la tentation de regarder. J’appris aussi la sténographie aisément mais ces matières techniques après m’avoir amusé quelques semaines pour leur aspect nouveau m’ennuyèrent vite à terme. Je détestais la comptabilité et le droit.
Nous avions un professeur de français extraordinaire, Madame Bellevue, une dame, la cinquantaine blonde, avec de jolis yeux turquoise pétillants d’intelligence, toujours souriante. Bien qu'avenante, elle imposait par sa présence et son autorité naturelle. Je fus conquise. Passionnée par son métier, le français et l’histoire, Ses cours étaient d’une grande qualité.. J’attendais avec impatience ses cours.
Elle organisa plusieurs promenades à Paris. Je me souviens encore de la visite de la conciergerie et de la Sainte-Chapelle.
Ecrire a toujours été naturel chez moi, je crois être née avec un stylo dans la main. Je n’avais jusqu’à présent jamais soigné mes rédactions. Dans le désir de plaire à Madame Bellevue, je me surpris à soigner mon style, à réfléchir beaucoup plus. Mes textes gagnèrent en maturité. J’étais fière quand elle les lisait à toute la classe.
Elle nous appris l’histoire contemporaine. Je buvais ses paroles. Le soir après la classe, je prenais beaucoup de plaisir à feuilleter des magasines, à les découper pour illustrer ses cours dans mon cahier d’histoire / géographie.
C’était un exercice que j’aimais beaucoup. Je crois que je garde de cette période la le goût pour illustrer des écrits par des images. Mon cahier était en quelque sorte un blog avant l’heure et il y avait même les commentaires élogieux de mon professeur sur mon cahier comme sur mon blog.
Je n’avais jamais eu auparavant d’aussi bonnes notes en Français et en histoire. Je discutais souvent avec Madame Bellevue après la classe. Elle me disait que c’était dommage que je ne poursuive pas d’études plus loin mais qu’elle était sûre que j’allais réussir. Je me confiais beaucoup à elle.
Par contre, je n’aimais pas la prof principale qui nous enseignait les matières professionnelles et c’était logique vu le peu d’intérêt que je portais à ses matières. Il m’arrivait parfois d’échanger quelques mots avec elle en cours et me retrouver dans le bureau de la surveillante générale.
Cette surveillante générale était redoutée, elle ressemblait un peu à la Folcoche de «Vipères au poing d’Hervé Bazin par son autoritarisme et son aspect rigide, impitoyable.
A force d’aller dans son bureau, j’appris à la connaître et à l’apprécier. Elle me grondait pour le principe quand je me retrouvais dans son bureau mais je sentis qu’elle était en fin de compte contente d’échanger avec moi. En plus elle n’avait pas l’air d’apprécier vraiment la prof d’enseignement technique et cela nous rapprochait.
J’avais d’excellentes notes dans toutes les matières générales et des notes assez médiocres dans les matières techniques ce qui faisait écrire à la prof principale sur mon bulletin de notes « Capable du meilleur comme du pire, mais devrait réussir ». Cela m’est resté parce que je pense que le début de cette appréciation est tout à fait véridique encore aujourd'hui : Je suis capable du meilleur comme du pire car je suis entière j’aime ou je n’aime pas et quand je n’aime pas, je le fais savoir avec impertinence.
A suivre.....