L'ascension du Ventoux
Publié le 20 Janvier 2011
Aujourd’hui je vais vous raconter mon entretien d’évaluation avec mon manager qui a duré 2H45. Près de trois heures pendant lesquelles, je me suis contrôlée, contenue mais bien amusée aussi.
Mon manager : Es tu mobile ? .
Moi : Qu’entendez vous par Mobile ? . Je mets un point d’honneur à le vouvoyer en insistant sur le « vous » alors que la plupart le tutoie
Mon manager : As-tu envie d’aller en France par exemple à Bordeaux, à l’étranger Hong Kong, Singapour…
Tous mes contrôles sautent devant l’incongruité de cette tirade et je lui réponds
«Oh non pas en Asie, je n’aime pas les nems, si vous avez quelque chose de sympa au soleil aux Antilles ou à Tahiti, faites moi signe, j’étudierai sérieusement votre proposition !!!
Rire de mon manager certes assez retenu mais c’est tellement rare de le voir sourire que cela me fait plaisir d’avoir réussi à
le dérider avec mes chinoiseries !
Je pense qu’il s’est rendu compte alors de l’absurdité de sa réponse qui a entraîné mon trait d’humour
Quelques temps plus tard.
Mon manager : Il faut que vous développiez encore plus en vous appuyant sur votre réseau que vous n’utilisez pas suffisamment. Et il ajoute « Qui d’autre que vous peut développer le business dans votre département ? » alors qu’il était prêt il y a quelques secondes à m’envoyer chez les chinois.
Silence de ma part
Mon manager : Voyez vous ne trouvez personne d’autre
Moi (plagiant Clémenceau) : « Les irremplaçables les cimetières en sont plein » et vu les circonstances il va bien falloir que vous songiez sérieusement à me remplacer et j’ajoute avec un petit sourire malicieux.. je pense que vous avez déjà une petite idée sur le sujet…
Il se contente d’un sourire moqueur pour me répondre.
Quelques temps plus tard :
Mon manager : Vous vous dites créative mais qu’avez-vous fait en 2010 qui peut me le prouver
Moi : J’ai toujours trouvé de quoi m’occuper quand vous me donniez volontairement plus rien à faire et la je peux vraiment dire que j’ai fait preuve d’une très grande créativité pour ne pas m’ennuyer.
Je pensais le faire rire à nouveau mais il ne rit pas.
Il remplit au fur et à mesure le compte-rendu d’entretien d’évaluation sur son ordinateur portable. A la fin de l’entretien, il me dit de « prendre sa place » enfin pardon juste de m’assoir dans son fauteuil pour relire sur écran le compte-rendu. « Je vous laisse le relire tranquille et je reviens pour la signature me dit-il en sortant de la pièce »
Je ne relis rien du tout, j’attends qu’il revienne
Quand nous réintégrons chacun notre place il me dit : "puis je l’imprimer".
Je lui réponds "bien sûr". Il s’absente de nouveau pour aller chercher le document à l’imprimante, s’empresse de le signer et me le tend. Je lui dis "Permettez moi que je relise sur papier, je ne sais pas relire sur écran". Je prends tout mon temps à la relecture. Je sens que l’hyperactif qu’il est commence à perdre patience. Je reste imperturbable, je termine ma lecture, je prends mon stylo et je le regarde en lui demandant,
« Puis-je écrire des réserves sur ce que vous avez écrit. »
Il me regarde faussement étonné en me disant mais « cela voudrait-il que ce je j’ai écrit ne correspond pas à notre échange ?"
Je lui réponds « d’après vous ? »
"Faites toutes les réserves que vous voulez" me répond t-il ?
Et la j’écris de ma plus belle écrire très lentement que ma signature sur ce document atteste de la remise du compte-rendu mais aucunement de mon accord sur son contenu notamment sur quelques points que je précise.
Pendant que je suis entrain d’écrire mes réserves, j’entends mon manager énervé qui s’exclame
« Ce ne sont plus des réserves mais un roman que vous écrivez ». J’arrête ma rédaction et je le regarde avec un grand sourire moqueur qui vaut toutes les réponses. Il sourit aussi avec malice. Je lui tends un des exemplaires. Il me souhaite une bonne journée
Bien que satisfaite de cet entretien, je ressors vidée comme si j’avais couru un marathon.
Je prends les transports en commun et je reviens dans mon bureau.
J’ouvre mes mails en commençant par celui du Service Communication dont l’objet pique ma curiosité : « Ascension du Mont Ventoux »….
Si vous êtes cycliste aguerri et si l’ascension du mont Ventoux vous tente, posez votre candidature. Seules 9 places seront attribuées pour la Région France. Une présélection aura lieu et sera menée par le Comité Exécutif (Quel honneur mais franchement je pensais que le comité exécutif avait autre chose à faire…)
Cette course sera dure, exigeante et ne peut s’adresser qu’à des amateurs confirmés (on s’en doute, nous prennent–ils pour des demeurés).
Les conditions requises pour poser sa candidature
- Avoir moins de 55 ans (et pourquoi qu’un cycliste entraîné de plus de 55 ans ne pourrait pas monter le Ventoux, c’est de la discrimination sur l’âge inadmissible)
-
Etre un sportif accompli
-
Etre depuis plus de 3 ans dans l’entreprise (et que fait-on pour l'intégration des nouveaux qui vont se sentir exclus. Remarquez que cela prouve que ceux qui ont 3 ans dans cette entreprise sont très résistants
du point de vue physique mais surtout psychologique important pour ce challenge sportif)
Et alors le pompon
- Parler l’anglais (je pense que lorsque que l’on monte le ventoux à vélo, il vau mieux ne pas parler du tout même en anglais sous peine de risquer l'asphyxie !)
Je préfèrerai que mon entreprise s’engage dans des actions humanitaires ou chaque salarié qui le souhaite pourrait participer.
Ce n'est qu'une entreprise me direz vous mais ne trouvez-vous pas qu’elle ressemble à beaucoup d’autres….
Beaucoup de salariés aujourd'hui cherchent à grimper dans l'entreprise, à se dépasser mais gare à ceux qui sont trop vieux, trop jeunes, trop gros, qui ne parlent pas l'anglais, qui n'ont pas de diplôme, qui ne sont pas mobiles, qui ne sont pas ci, qui ne sont pas ça.... car leur cheminement dans l'entreprise est comparable à celle du Ventoux, elle devient pour beaucoup impossible et à défaut de pouvoir monter plus haut ou même tout simplement de se maintenir, il pédalent dans le vide et finissent par dégringoler... dure est leur chute pour eux et pour leur famille.