Calvaire des filles

Publié le 15 Septembre 2017

Calvaire des filles

C’est la fin de l’été, le temps est exécrable.  Je déprime dans mon studio parisien du boulevard du Temple tout près du métro fille du calvaire. Ce métro doit son nom au couvent voisin Notre Dame du Calvaire. J’envie la vie paisible et protégée des religieuses et si je croyais en Dieu, j’aimerais les rejoindre.  Elles semblent si calmes et joyeuses. On pourrait les appeler filles de joie mais c’est moi qui en suis une même si je peux vous assurer que ce surnom donné aux prostituées est très mal approprié et que mon existence et celles de mes consœurs d’infortune  sont un calvaire permanent.  Nous sommes des filles de tristesse. Nous ne donnons pas la joie à nos clients, juste un peu de plaisir physique et même pas toujours car parfois leur attente est si grande qu’on ne peut la combler. Je veux changer de profession mais quel autre choisir ? Cette question m’obsède la nuit et m’empêche de dormir.  Enfant de la DASS, j’ai quitté l’école très jeune et je n’ai pas de métier. J’ai juste le sens du service. J’ai envie d’être utile aux autres, les rendre plus heureux. Je n’ai que cela à écrire sur mon CV, aucune formation, une expérience professionnelle que je ne peux avouer. Je me sens condamnée à être esclave sexuelle toute ma vie.  En ce moment j’attends la rame en direction de Balard sur le quai du métro, et si je me jetais dessous quand elle arrive. Ce serait un beau titre dans les journaux « une fille de joie se suicide à la station filles du calvaire ». J’y pense bien souvent mais n’ai jamais eu le courage de passer à l’acte. La rame arrive dans un bruit fracassant. Je ne saute pas, je recule même sur le quai.  Je pénètre dans le wagon, m’assois tout près d’une vitre avec comme seule occupation de regarder les stations défiler : « République », « Strasbourg Saint-Denis ». Nous voici arrivés à la station suivante. Une publicité hôtelière affichée près du nom de la station attire mon attention. Il est écrit « Je suis libre ici » il y a aussi le mot « logis » tout près du nom de la station « Bonne Nouvelle ».
 

Calvaire des filles

Une idée me vient : j’ai trouvé ce que je voulais faire et si je devenais agent immobilier. « Enfin une bonne nouvelle dans ma vie ».

Martine / Pour  l'Atelier 47  de Ghislaine (les mots et la phrase en gras sont imposés)

Rédigé par Martine.

Publié dans #Ecrits divers

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G
Ton texte est un peu triste Martine, mais on ne peut toujours être dans le rire...........<br /> Tu me rappelles mon Papa qui nous racontait sa vie à l'orphelinat 'cela s'appelait ainsi à son époque)<br /> La vie n'y était pas belle ........Il a fallu atteindre ses 18 ans pour en partir.......<br /> Peut pour cela qu'il a fait une grande famille dont je suis l'ainée..........<br /> Agent immobilier?? Pourquoi pas ? Tu pourrais passer a ""cherche appartement "" avec Monsieur Plazza lol<br /> Merci de t'être dénoncé Martine...........<br /> Merci aussi de suivre, moi je ne suis pas encore<br /> remise de ce sejour mais ca vient doucement<br /> Ta santé a toi ?? dis moi ??
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M
Bel article!<br /> Bonne soirée,<br /> Mo
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I
belle utilisation des noms de stations! Fallait y penser!<br /> Bises<br /> Dany
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D
toujours beaucoup d'imagination ; et une belle fin. Bises
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M
Un parcours de vie fait de désillusions et de petits arrangements avec soi
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C
Quel métier, oui, en effet !!! Atelier magnifiquement relevé Martine ! Bravo ! Bonne poursuite de ce vendredi et doux week-end ! Bisous♥
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L
Oh, excellente "nouvelle" (du genre littéraire !), justement, bravo Martine. Tranche de vie acérée ! Gros bisous.
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J
Ce n'est pas un long fleuve tranquille la vie des filles de joie , j'espère que celle dont tu décris le parcours arrivera à changer de métier .<br /> Bien vu pour l'atelier de Ghislaine <br /> Bonne journée <br /> Bisous
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N
Un grave sujet que tu as pu écrire en y mettant une note optimiste sur la fin. Ont-elles vraiment le choix? Belle journée pour toi et gros bisous
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.
hello....<br /> bien des choses Martine
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D
Un très beau texte, pour une vie que j'imagine sans joie.<br /> bonne journée,
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É
Bravo pour ce joli texte ! Le plus vieux métier du monde est celui que je n'aurais jamais voulu exercer...
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Q
Tu as réussi à donner une fin heureuse à ta page... C'est extra.<br /> Et, comme toujours, tes jeux de mots me ravissent.<br /> J'aime ta façon d'écrire, même sur des sujets très sérieux.<br /> Passe une douce journée. Bisous.
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A
il y en a des histoires à écrire avec les noms de stations de métro ! c'est un régal.<br /> Bravo pour ton texte et ses subtils jeux de mots.<br /> arielle
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M
Merci pour ce joli texte...en effet les filles de joie n'ont de joyeux que le nom...qu'elle tristesse que leur vie. Bisous et une belle journée
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Z
Un joli texte Martine et une triste vie pour ces filles qui en plus sont drivées par des proxénètes. Bises et bonne vendredi
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J
Jolie broderie à partir du métro, nom et pub... ;-) elle a raison cela rapporte aussi, autrement que... même si tant de nos jours, bises jill
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