Les hommes de ma vie (2) / le névrosé
Publié le 5 Juin 2009
Peu de temps après avoir quitté l'entreprise de transport, je réponds à une annonce d'un laboratoire
pharmaceutique cherchant une secrétaire pour un de ses directeurs régionaux. Contribuer par mon travail à fournir des médicaments aux malades me rapproche un peu d'un rêve d'enfant celui de
devenir Médecin ou infirmière que je n'ai pu réaliser.
Ie me présente très motivée et je suis retenue par le Directeur du Personnel du Siège Social, puis par mon futur patron Monsieur Olivier Masson.
La Direction Régionale est dans un très beau quartier de Paris au Carrefour de l'Odéon, rue de l'ancienne comédie. Nous sommes en rez-de-chaussée. Les locaux sont luxueux et modernes. Je suis dans le même bureau que Monsieur Masson. Il y a deux autres directeurs régionaux et leurs secrétaires ainsi qu'une hôtesse standardiste.
Au début c'ést parfait, j'ai un travail intéressant. Je fais l'interface entre mon patron et son équipe de visiteurs médicaux qui sont bien sympathiques. Je participe aux réunions mensuelles et j'en fais le compte rendu. Je trouve néanmoins Monsieur MASSON particulier., un rien étrange.
A 45 ans environ, de taille moyenne, il est toujours vêtu d'un costume gris clair, d'une chemise blanche et de
cravates très sobres.. Il parle peu et est en permanence nerveux et angoissé. Les deux autres directeurs ne le fréquentent presque pas et le critiquent beaucoup, il est très seul mais il s'isole
lui-même. Il ne parle jamais de lui et de sa famille.
Perfectionniste, il est très exigeant sur la qualité du travail mais cela ne me gêne pas car je suis très
rigoureuse à l'époque. Ce n'est plus le cas aujourd'hui où ma créativité prend le dessus sur la précision.
Tous les midis il déjeune seul au très beau et ancien restaurant « le Procope » qui est juste en face du
bureau.
L'intérieur du Procope / Photo flickr
Je le trouve de plus en plus bizarre, déphasé mais à cette époque je ne cherche pas encore à analyser les
comportements comme je le fais aujourd'hui. Il ne fait confiance à personne. Il part souvent pour aller contrôler, on pourrait dire espionner, ses visiteurs-médicaux sur le
terrain.
Quand il est absent du bureau une journée, le lendemain il me demande de lui décrire par le menu tout ce que j'ai fait la veille. Un jour je lui dis qu'un autre directeur régional m'a demandé de lui taper un document et que je l'ai fait. Il se met en colère subitement et va trouver ce directeur dans son bureau en lui criant « je t'interdis de donner du travail à ma secrétaire ». Il s'en suit une dispute virulente entre les deux hommes.
Aujourd'hui, avec mes quinze ans de relations interpersonnelles en face à face avec des femmes et des hommes de tous âges et de tous niveaux, je dirai que Monsieur MASSON était un maniaco-dépressif parfois même obsessionnel.
Pendant plusieurs mois, je supporte sa méfiance permanente, son manque de confiance, ses colères pour des
broutilles.
Un jour je lui reproche de ne pas me faire confiance .... Il se met très en colère me prend par les épaules et me
secoue en criant « je suis gentil, je suis gentil ». Ce n'est plus supportable.
La violence entraîne la violence. Un autre jour face à une autre de ses crises, j'attrape sur mon bureau impulsivement le premier objet que j'ai sous la main : un rouleau d'adhésif et je le lance dans sa direction. Je crois que je vais être licenciée et bien non, cela curieusement l'a calmé.
Un vendredi matin, je suis malade, des vomissements. Je ne vais pas travailler. Je le préviens par téléphone. Il ne me croit pas et se met en colère. Le lendemain samedi c'ést la réunion mensuelle de la Direction Régionale au siège de l'entreprise au sud de Paris.
Je vais un peu mieux alors j'y vais car je dois prendre des notes en sténo et faire ensuite le compte-rendu. J'arrive dans la salle, il ne répond pas à mon bonjour. Il attend que tous ses visiteurs médicaux soient présents et il me renvoie à domicile en me disant qu'il n'a pas besoin de moi aujourd'hui et que c'était hier que je lui ai fait défaut. Je crie que je vais retourner chez moi et que je ne reviendrai plus jamais parce que je vais dès lundi démissionner.
Le lundi matin, je me rends au siège voir le chef du personnel et je lui remets ma démission. Je lui demande de me
dispenser de mon préavis car je ne peux plus supporter mon Directeur et que cela pourrait se finir mal. Il m'écoute puis me propose un poste de secrétaire au Siège me disant que les deux
autres directeurs régionaux lui ont dit beaucoup de bien de moi et que j'ai battu un record. Monsieur MASSON a eu plusieurs secrétaires successivement qui ne sont restées que très peu de
temps. Je suis la seule à avoir tenu un an ce qu'il a l'air de prendre pour une performance !
Je le remercie chaleureusement pour sa confiance et cette proposition que je décline, le 13ème arrondissement est trop loin de chez moi et j'ai envie de me rapprocher de mon domicile.
Je me mets de nouveau à rechercher un emploi mais je suis très déçue de mes débuts professionnels et de mon métier qui a consisté à supporter des comportements anormaux de mes patrons.
Vais je enfin le trouver ce patron qui me ferait confiance et avec qui j'aurais des relations agréables ?
A suivre......